lecture : Carnet du trimard de Jack London



Comme grand nombre d’oeuvres de jeunesse, le ‘Carnet du trimard’ de Jack London est un éclairage, un balbutiement surgi de l’âge des amours naissantes qui augure de la mue en une voix littéraire. Ce journal inédit est aussi bref que percutant. London y fait le récit quotidien de ses pérégrinations à travers l’Amérique. En 1894, il rejoint l’”armée industrielle” une troupe de chômeurs qui, sous l’impulsion de Jacob Coxey, un entrepreneur idéaliste, marche sur Washington dans le but de pousser le gouvernement à subventionner son projet de construction de routes à travers tout le pays. Les soldats de cette armée fantoche, des va-nu-pieds, s’embarquent illégalement dans des wagons de marchandises, où des garde-trains et la police leur laissent peu de répit.

Jack London, à 18 ans à peine, est déjà bien amoché par la vie. Il affronte les réalités à coups d’enthousiasme et de camaraderie, avant d’en rendre compte dans une touchante ingénuité. Avec ses compagnons d’infortune, il pratique l’insubordination et le putsch comme des gosses qui jouent à faire semblant. On “dégomme” les capitaines quand d’autres passent en cour martiale. Dans cette parodie militaire, l’écrivain voit s’éveiller son goût et ses engagements. Au confort ou à la concession, il préfère l’aventure et la révolte.

La vie sauvage et rude, l’amour des grands espaces ou des animaux, les prémices d’une conscience socialiste, autant de fondamentaux de l’oeuvre de Jack London sont à l’ébauche dans son carnet, derrière les détails d’un quotidien de souffrances et d’incertitudes. Ce court journal renferme les ingrédients de ‘La Route’, son roman initiatique publié en 1907. Il reflète autant de déceptions que d’espoirs et laisse le souvenir d’un extraordinaire passage vers l’âge d’homme. 

Carnet du trimard de Jack London
Editeur : Tallandier
Publication :6/12/2007

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